Blague de Sherlock et Watson font du camping. Le soir ils mangent et surtout boivent copieusement.. Un terrible orage secoue la tente, mais comme ils sont sérieusement imbibés, il ne s’en rendent pas compte et tombent dans une stupeur éthylique.
En pleine nuit, Sherlock réveille Watson et lui demande :
- “Que vois-tu ?
- “Astronomiquement, je vois qu’il y a des millions de galaxies, potentiellement des milliards de planètes. Astrologiquement j’observe que Saturne est dans la constellation du lion. Du point de vue de l’heure, je déduis qu’il est approximativement 3 heures moins le quart. Pour ce qui est de la météo, je suspecte que demain il fera très beau”
- “Watson tu es un idiot, pendant l’orage, la tente s’est envolée.”
Watson savait beaucoup de choses. Pourtant, il n’avait pas vu l’essentiel… Nous regardons au travers de nos cartes mentales qui nous font interpréter la réalité. Parfois, elles nous empêchent de discerner ce qui est important, de voir avec amour. Nous allons voir cela illustré dans une scène quand Jésus demande à Simon le pharisien “Vois-tu cette femme ?”
Essayons d’observer scène avec les yeux d’un oriental de la Palestine du 1er siècle, ensuite comment voir au-delà des apparences et enfin quelle résonance ceci peut avoir pour nous très concrètement
Comprendre l’histoire avec les yeux d’un oriental
Tout d’abord je voudrais tenter de faire revivre cette scène avec les codes et les moeurs de l’époque et du lieu.
La culture orientale est une culture d’honneur et de honte. La crédibilité de quelqu’un vient de sa famille et chacun tient à ajouter à l’honneur de la famille. Inversement quiconque amène la honte sur lui amène la honte sur la famille et la communauté. C’est pourquoi, lire la parabole du fils prodigue avec cette optique permet de mieux la comprendre.
Deux personnages entrent en collision dans la narration
- un homme / une femme
- un gardien de la loi / une pécheresse dont le métier la portait à la plus vile des transgressions de la loi.
- Enfin, Un homme certainement aisé, considéré, respecté / une moins que rien, méprisée.
Un affront public, intentionnel, utilisant les codes sociaux
Simon va utiliser les coutumes, les règles sociales dont il est un des gardiens pour parvenir à ses fins qui sont d’humilier publiquement Jésus
Simon un des pharisiens, pas “le pharisien”. Cela signifie qu’il fait partie d’un groupe et ce groupe délègue Simon pour une mission, comme il avait délégué Nicodème au début de son ministère..
Simon prie Jésus de manger chez lui mais ne lui rend pas les honneurs qui lui sont dûs
- donner un baiser
- offrir de l’eau pour les pieds
- oindre d’huile la tête
Peut-on imaginer qu’il ait simplement “oublié”. Jésus va être placé dans une situation humiliante sans qu’il ne puisse se défendre, car il est l’invité.
Le repas sent un peu le traquenard : les pharisiens font tout pour discréditer Jésus. Comme ils ne peuvent le trouver en défaut sur sa conduite ou ses paroles, ils vont tenter de lui nuire en le rabaissant.
Simon et Jésus ont une explication de gravure.
On ne sait pas pour quel résultat. On peut espérer, parce qu’on connaît son nom que Simon était connu des disciples et est donc lui même devenu disciple, mais c’est juste une supposition
Une démonstration publique d’amour et de vénération, qui enfreint les codes sociaux
Cette femme, une prostituée va enfreindre publiquement les coutumes et règles sociales pour honorer Jésus
- La femme est une pécheresse connue de la ville – une prostituée
- Elle pénètre sans invitation. Sa simple présence rend la maison impure
- Elle touche Jésus, elle la prostituée, elle déshonore le rabbi, le maître
- Cette “pécheresse” dénoue ses cheveux, qui devaient rester cachés aux yeux des hommes
- Elle baise les pieds sales de Jésus
- Elle offre un parfum qui est un instrument de son travail
Cette manifestation d’amour est acceptée avec naturel, sans que Jésus ne dise un mot. Dans la tradition une telle manifestation d’amour acceptée créé entre deux personnes un lien que rien ne peut défaire.
Vois-tu cette femme ? Un appel à voir au delà des apparences
La question de Jésus est rhétorique : on ne voyait qu’elle. Elle était une gêne elle était un scandale, elle était une tâche dans une parfaite soirée. Elle était un grain de sable dans une machination qui se déroulait comme sur des roulettes.
Il faut toujours être alerté quand Dieu ou Jésus posent une question. Non pas pour nous accabler, mais pour que de nous même, nous réalisions que ce que nous avons fait n’est pas juste
Vois-tu cette femme ? Bien sûr, on ne peut pas la rater, comme un éléphant dans un couloir. Elle rentre sans autorisation elle a une conduite impudique, scandaleuse.
Si Jésus pose la question à S, c’est qu’il veut attirer son attention sur une autre réalité qui n’est pas l’apparence, la réalité visible. Il nous appelle à un discernement.
Discerner, c’est d’abord savoir qu’il y a quelque chose à voir au delà des apparences
Quand la nuit est claire et le ciel étoilé, on voit des millions de points lumineux. Pour discerner une étoile ou une planète, il faut savoir que telle planète existe et avoir une carte. J’étais tout content l’autre jour d’avoir pu télécharger une application et repéré quelques astres. Il fallait que je sache que ces points lumineux étaient des étoiles ou des planètes. Il fallait soir où regarder
À un premier niveau, voir la personne derrière la personne : quand nous sommes confrontés à une situation ou à une personne, il faut savoir discerner humainement les choses. Avoir de l’empathie. Derrière cette prostituée, il y a une femme abandonnée, Derrière ce réfugié, ce SDF, il y a une histoire, une souffrance, une dignité. Derrière ce PDG ou ce cadre arrogant, il y a parfois une éducation, une souffrance.
Il faut que nous soyons spirituellement avertis des réalités du monde spirituel, “Car nous n’avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les dominations, contre les autorités, contre les princes de ce monde de ténèbres, contre les esprits méchants dans les lieux célestes.” (Éphésiens 6:12 LSG)
L’apôtre Paul nous montre que nous avons besoin de savoir reconnaître les esprits. Dans l’église, nous voulons les charismes de puissance, mais recherchons-nous celui du discernement des esprits? “à un autre, le don d’opérer des miracles ; à un autre, la prophétie ; à un autre, le discernement des esprits ; à un autre, la diversité des langues ; à un autre, l’interprétation des langues.” (1 Corinthiens 12:10 LSG)
Celui qui détient la carte des réalités spirituelles, c’est le Saint-Esprit qui nous permet de pouvoir voir.
Discerner c’est avoir la faculté de voir, avoir l’esprit ouvert pour voir au delà des apparences
L’œil de Simon voit un ensemble de formes et de couleurs que son cortex cérébral va transformer en image et une autre partie de son cerveau va l’associer à des cartes mentales qui vont classer cette image dans plusieurs catégories : femme, pécheresse, comportement impudique. Simon ne peut s’empêcher de faire ces associations il est conditionné par son instruction.
Il y a des malades chez qui cette association entre image et perception est dysfonctionnelle. Il voient des formes et ne peuvent associer un nom, un usage. Une autre forme de la maladie consiste à ne pas pouvoir reconnaître des visages Prosopagnosie : Brad Pitt, Thierry Lhermite (qui ne reconnaît pas sa propre sœur)
Le péché créé en nous un endurcissement du cœur qui provoque une prosopagnosie spirituelle : on voit sans reconnaître, on regarde sans discerner
Pour que Simon voie au delà de ses cartes mentales, il lui aurait fallu plus qu’une remarque, il lui aurait fallu une guérison
Comme Simon, nous fonctionnons avec des cartes mentales, des préjugés. C’est utile, même indispensable, mais le péché en nous fait que ces cartes sont corrompues et nous amènent à voir l’autre pour ce qu’il n’et pas et à le juger et à dégrader la qualité de relation.
Qui de nous n’a pas ce sentiment, cette soif de reconnaissance, que les autres nous comprennent et nous prennent pour qui nous sommes et mieux pour qui nous voudrions être
Un daltonien ne va pas distinguer les couleurs, ce n’est pas qu’il ne le veut pas, c’est qu’il ne le peut pas, il a besoin d’une guérison, il a besoin d’un miracle.Il a besoin qu’on lui ouvre les yeux. C’est ce que fait Jésus pour Simon.
Comme Simon, nous avons besoin d’un miracle renouvelé pour voir avec amour au delà des apparences et sortir de nos prisons mentales. Mais ce miracle n’est possible que si Simon coopère et accepte de tourner les yeux vers la femme
Discerner, c’est avoir la volonté de voir au delà des apparences
Vous connaissez la phrase : circulez, il n’y a rien à voir. Devant certaines réalités on préfère ne pas regarder
Voir notre propre hypocrisie
“Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère, et n’aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil ? Ou comment peux-tu dire à ton frère : Laisse-moi ôter une paille de ton œil, toi qui as une poutre dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton œil, et alors tu verras comment ôter la paille de l’œil de ton frère.” (Matthieu 7:3-5 LSG)
Jésus procède à une comparaison peu flatteuse de ce gardien de la loi et de cette pécheresse. Tout respectueux de la loi, S avait failli à la justice. Toute transgressive de la loi, la femme avait accompli la justice envers Dieu.
L’hypocrisie, c’est de ne pas s’appliquer les mêmes règles que celles par lesquelles nous jugeons les autres.
Par exemple, on va dire “oui, mais il fume”, ou bien “il fait ci”, “elle fait ça”, “c’est grave, ce que je fais n’a rien de comparable”
Jésus dénonce l’hypocrisie non pas pour embarrasser Simon, mais pour qu’il se débarrasse de ce qui l’empêche d’accéder au Royaume de Dieu
La femme avait laissé son péché, il était connu de tous, il était vidé aux pieds de Jésus et pour jésus il avait une bonne odeur ! celle de la repentance.
Pour guérir de l’hypocrisie, il faut ouvrir les yeux, il faut casser le vase
Voir avec compassion
En creux, Jésus dit à S tu vois cette femme, elle a droit à ta compréhension, elle a droit à ton regard, elle a droit à ta bienveillance, elle a droit à ta générosité. Si toi et tes pairs aviez fait quelque chose pour elle, elle n’en serait pas arrivé là. Une femme ne se prostitue pas par choix
La compassion, littéralement, c’est “souffrir avec”, ressentir ce que l’autre sent. Il ne s’agit pas d’une délicate attention d’une dame patronnesse.
Heureux les pauvres en esprit. Pas les débiles mentaux, ceux qui ont une mentalité de pauvres, qui en veulent, qui sont prêts à travailler dur, à souffrir pour sortir de leur condition.
On peut être riche sur son compte en banque et pauvre en esprit, sentir et vivre comme quelqu’un qui se sent pauvre et qui a besoin de s’enrichir. Qui a faim et soif de relation fructueuse avec les autres
Heureux ceux qui ont la mentalité de pauvres : qui attendent tout du Seigneur et qui sont prêts à donner tout. Ésaïe 58 et dans de nombreux passages, Dieu nous pointe comme une boussole vers les pauvres.
Vois-tu cette femme ?
Plus que jamais, aujourd’hui des milliards de jugements sont passés sur les réseaux sociaux par des gens qui sont manipulés. Ils ne connaissent rien et pourtant qui ont une opinion et émettent des jugements parfois de morts sur tel ou untel. Qui sont-ils pour juger, que savent-ils ? quelle autorité ?
C’est aussi à nous que Jésus pose la question.
- Vois-tu cet homme, cet femme, cet enfant ?
- Je ne te demande pas nécessairement d’approuver sa conduite
- Vois-tu ses besoins ?
- Alors, cette personne dans ta famille, au travail regarde là différemment
- Et souviens-toi, moi aussi je t’ai accepté avec ton péché
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